Ceci est l’histoire de Théo et Suzanne.
Ceci est l’histoire de Théo et Suzanne.
Mon père, Theo, qui est mort 30 ans avant que je ne commence cette installation, a commencé à photographier des diapositives au début de son mariage en 1959. Jusqu’à sa mort en 1989, il a photographié environ 5 000 images.
Ses sujets sont typiques : portraits de la famille, de la maison et des vacances. Il n’était pas particulièrement bon photographe (au contraire) mais les 5 000 diapositives donnent une image d’une petite famille « standard » des années 60, 70 et 80. Et surtout : elles retracent la vie conjugale de ma mère, Suzanne De Volder.
Mon père comptait environ 2 700 diapositives, il n’a jamais classé le reste.
J’ai ordonné les diapositives en 7 « chapitres », je les ai projetées et je les ai filmées. Nous voyons les imperfections et les dégradations des images et de la projection : elles ne sont pas claires et sont sur/sous-exposées, à l’envers (gauche/droite ou haut/bas). Certaines sont partiellement recouvertes de mousse ou de champignons, ou mal installées dans le cadre. De temps en temps, le projecteur cale, et parfois, je dois retourner les diapositives. Mais je laisse la plus grande partie comme elle est.
J’enregistre le son du projecteur et des diapositives, le son fait partie intégrante de la vidéo.
Puis j’ai confronté ma mère (qui avait 97 ans quand je l’ai enregistrée) à son passé tel que je l’avais filmé à travers les images de mon père. Elle n’avait pas vu les photos depuis sa mort. Pendant 5 soirées, je filme la façon dont elle se bat pour (re)absorber un maximum de son passé.
Nous la voyons intéressée, étonnée, perdue. Elle reconnaît certaines images et en a oublié d’autres. Elle lutte pour ne pas s’endormir, s’endort et se réveille. L’enregistrement de ma mère a été fait sans son.
La nuit suivant le 5e soir, ma mère a une attaque. Elle n’est plus en mesure d’assister aux enregistrements. Pour les 2 derniers chapitres, je filme une place vide.